dimanche 9 avril 2017

Investissement direct étranger : de nouvelles observations

Dans une policy-note récente[1], Blanchard et Acalin ont remis en question le consensus international selon lequel l’investissement direct étranger est « un bon flux », tandis que les investissements en portefeuille sont des flux volatils et leurs retombés sur l’économie restent ambigus.
En examinant les flux d'IDE vers 25 pays émergents[2], les auteurs ont relevé trois faits qui suggèrent que l'IDE mesuré est en fait très différent de celui que les décideurs imaginent.
Premièrement, il a été observé que la corrélation entre les entrées et les sorties des IDE dans ce panel de pays émergents est étonnamment élevés en avoisinant 51%. Un préalable raisonnable serait que cette corrélation devrait être proche de zéro ou même négative: Si un pays est, pour quelque raison, plus attrayant pour les investisseurs étrangers, il n'est pas évident que les investisseurs nationaux voudraient investir à l'étranger.
Une première explication de ce résultat peut être que la corrélation ne reflète qu’une tendance commune pour les deux séries sans pour autant qu’il y ait un lien entre les deux séries. Cela joue un rôle mineur car même si les entrées et les sorties d’IDE sont corrigées en les rapportant à la tendance du PIB, elles présentent une corrélation de 33% dont six pays ont une corrélation dépassant 60%.
 La seconde explication est que les facteurs saisonniers sont probablement en jeu. Cela ne semble pas non plus impacté les résultats. La corrélation moyenne entre les entrées et les sorties d'IDE ajusté des facteurs saisonniers, est de 33%. Cinq pays ont toujours une corrélation supérieure à 60%. 
Une troisième explication est que  la corrélation est l'implication de l'équilibre sur le marché des changes. Ainsi, l'ajustement du taux de change peut conduire à une corrélation positive entre les entrées et sorties d'IDE. Par exemple, une augmentation des entrées d'IDE peut conduire à une appréciation, ce qui rend plus attrayant pour les investisseurs nationaux à investir à l'étranger, et donc conduire à une augmentation des sorties d'IDE. Cet effet peut être en partie à l'œuvre.
La quatrième explication est que la corrélation reflète la couverture des risques. Une couverture simple, pour une entreprise qui investit dans un marché émergent, consiste à emprunter auprès du marché domestique par sa filiale et à réinvestir les fonds à la société mère, couvrant ainsi le risque de change découlant de l'investissement initial. Dans ce cas, l'afflux d'IDE vers un marché émergent sera égalé par une sortie d'IDE de ce pays.
La deuxième observation qui ressort de ces données est que les entrées d'IDE sur les marchés émergents répondent positivement à une baisse du taux directeur des États-Unis. A priori, on devrait s’attendre à ce que les flux d'IDE ne réagissent pas beaucoup, voire pas du tout, aux variations de la politique monétaire eux Etats-Unis, c'est-à-dire que l'effet devrait être proche de zéro.
Dans la même lignée, les auteurs ont trouvé que la réponse des flux d’IDE aux variations du taux d’intérêt est plus forte que la réponse des flux de portefeuille dans le panel de pays émergents. Ces résultats sont très frappants et ils sont cohérents avec la constatation d'une corrélation élevée entre les entrées et sorties d’IDE.
Troisièmement et bien que les résultats de différents pays de l’échantillon pointent vers la même direction, il existe des différences dans l’ampleur des corrélations et des réponses aux variations du taux d’intérêt. Les auteurs estiment qu’à ce titre la législation en termes de taxation et contrôle de capitaux jouent un rôle important pour expliquer les disparités entre pays. En guise d’illustration les auteurs ont pris l’exemple de la Hongrie. L'une des raisons pour lesquelles la Hongrie a une corrélation aussi forte entre les entrées et les sorties d'IDE s'explique par le fait qu'elle a un traité fiscal bilatéral avec les États-Unis. Cela signifie que les résidents de pays tiers peuvent bénéficier de ces traités en passant par un investissement en Hongrie. Cette pratique permet à de nombreuses entreprises d'utiliser la Hongrie comme un moyen de transport de fonds vers les États-Unis.
A la lumière des observations précédentes, les auteurs concluent par rappeler que les flux d'IDE vers les économies émergentes ne semblent pas désigner des flux de caractère de long terme, comme on l’a cru pour longtemps, ce qui appelle à la fois les chercheurs et les décideurs à relativiser lorsqu’il s’agit de l’évaluation de l’investissement direct étranger.



[1] What Does Measured FDI Actually Measure? Blanchard et Acalin (2016), Peterson Institute for International Economics.
[2] Argentine, Brésil, Bulgarie, Chili, Chine, Colombie, Croatie, République Czech, Hongrie, Inde, Indonésie, Israël, Corée, Malaisie, Mexique, Pirou, Philippines, Pologne, Romanie, Russie, Slovaquie, Afrique du Sud, Thaïlande, Turquie, et Vietnam.

jeudi 30 mars 2017

The replication of Gali (2010) is now available ! not really available !

In recent collaboration together with Johannes Pfeifer, we replicate the study done by Gali (2010) : Monetary policy and unemployment, which can be found here

In his paper, Gali builds on the New Keynesian model and relies on the search and literature to integrate the labor market frictions in such a model. The main finding is that labor market frictions matter, both for the shape of the economy and for the design of monetary policy. 

But I'm not writing this blog about the paper and the topic of monetary policy and unemployment. This post is more on the experience of replication, what it teaches and what it reveals.

This experience -of replicating other's work- was interesting in more than aspect. First, the deep understanding of a paper cannot be achieved only by reading. More you get involved, more you enhance your understanding. Second, we learn important things: how to build a model with all the difficulties that go with, how to ask a questions about the plausibility of approach used, how to go further and extend the model, etc. Always, when reading an article we tend to have the impression of that we can do the same easily. But when engaged really in the work lot of difficulties arises, which are challenging and of course learning-enhancing.

More interestingly, we found that we cannot replicate exactly the model of Gali (by using his calibration values) due to some inconsistencies in the calibration and in the definition of some variables. Lesson to learn is not to always take the results of paper as granted! 

Gali (2010), is it a case of the 'crisis of replication' ?


vendredi 3 février 2017

Discussion with Olivier Blanchard on Macroeconomic Models

Discussion with Olivier Blanchard on Macroeconomic Models



In recent post by Blanchard, entitled ‘The Need for Different Classes of Macroeconomic Models’, he underlined the need for different classes of macro models for different tasks. Two classes of models are considered. First, theoretical models that are micro founded and are intended to clarify theoretical issues within a general equilibrium setting, like DSGE models. Second, policy models that might not be micro founded and aimed at analyzing specific issues related to the macroeconomic policy. Blanchard describes the finding of one model that can respond to both uses as a pipe dream.

In a correspondence discussion with Blanchard, I expressed my surprise vis-à-vis the proposition of separation between theoretical and policy models. The aim of science is the unification, I think, rather than separation. If we look at physics, the efforts of all scientists are oriented to understand and consequently to provide theories to what they observe. In line with this observation, I believe that macroeconomics, like physics or any other science, should have the objective of unifying what we observe and what we theorize. In favor of this claim, one can notice that macroeconomics is very young science. At the end, there is still a long way to go to achieve this.

In response to my claim, Blanchard thinks that the goal of unifying both classes of models is unattainable, surely today, and probably forever, given the complexity of seven billion people interacting in complex ways. The main point is that trying to do both classes in one model today is counterproductive.   

To conclude, I think that the complexity of interactions between economic agents is surmountable if we internalize those interactions and behaviors in our models, we can arrive at the stage where there are no conflicts between theory and practice. Especially, the research agenda on the New Keynesian economics studied within a behavioral framework is oriented to this aim.

samedi 31 décembre 2016

A Critical Issue Adressed to Joseph Stiglitz

A Critical Issue Adressed to Joseph Stiglitz

In "The Euro: How a Common Currency Threatens the Future of Europe", Joe emphasizes the reasons why the Monetary Union Zone has a mediocre macroeconomic results, analyzes the policies implemented by the Troika and proposes some solutions for a better Europe.

One of the sources of pain of Europe, the author points out the ideology behind the construction of the euro zone. Mainly the neoliberalism ideas which characterized the spirit of the most powerful institution: the ECB.

While hi criticizes the neoliberlism in lot of parts of his book, the author proposes as a solution - to limit the current account deficit for a country that will quit the euro zone - : the use of imports/exports certificates. His argument consists of creating a market of those certificates, and the trade in a free market for those certificates will equal the supply and demand. As a result, the cc deficit will be absorbed.


My takeaway:  this solution proposed is inconsistent with the author's mind that markets delivered to themselves do not produce optimal results. Unless, Stiglitz points to another concept of free market.

jeudi 27 octobre 2016

La stagnation séculaire dans un contexte d’économie ouverte

La stagnation séculaire dans un contexte d’économie ouverte
Dans un document fondateur, Blanchard et al. (2015) ont souligné qu’au cours des 40 dernières années, les récessions dans les pays avancés ont été associées souvent à une croissance plus faible au lendemain des crises. Les interrogations sur les causes de ce constat sont de deux natures. D’abord, la croissance potentielle s’affaiblie suite à un retournement de cycle économique, traduisant une insuffisance de l’offre qui soit due à une panoplie de facteurs : faibles gains en productivité, hausse des inégalités sociales, vieillissement de la population active, globalisation, rareté des matières premières, destruction de capital productif, dépréciation du capital humain des chômeurs et une baisse drastique de l’investissement. Ensuite, l’output gap devient anormalement persistant,  ce qui révèle une incapacité à faire converger l’économie vers le plein emploi. La crise économique et financière de 2008, ne faisant pas exception, a donné lieu à une sévère récession qui se caractérise par une reprise anormalement lente (Summers, 2013 et 2014 ; Rawdanowicz et al., 2015), où les économies avancées se sont plongées dans un environnement de croissance faible et de taux d’intérêt proche de zéro, et le seront encore sur un horizon indéfini (Summers et al., 2016). D’où l’hypothèse d’une stagnation suffisamment durable pour être déclarée « séculaire ».
 L’hypothèse de stagnation séculaire a été pour la première fois  évoquée en 1938 dans un discours de Hansen qu’il publiera en 1939 dans un article intitulé « Economic Progress and Declining Population Growth ». Ce dernier s’inquiète alors d’un investissement insuffisant aux États-Unis et d’un déclin de la population après une longue et forte période d’expansion économique et démographique. L’hypothèse de stagnation séculaire s’interprète comme une abondance d’épargne entraînant une baisse du taux d’intérêt réel « naturel » (celui compatible avec le plein emploi) en dessous de zéro. Or, si le taux d’intérêt réel reste  durablement au-dessus du taux naturel, il en résulte un déficit chronique de demande globale mais aussi d’investissement ce qui entrainera une dépréciation de la croissance potentielle. Pour contrer une telle configuration, les autorités monétaires ont donc choisi, dès le début de la crise aux États-Unis, et avec plus de retard en Europe, une politique accommodante avec une baisse du taux directeur. En effet, une telle politique est censée réduire les taux d’intérêt nominaux et donc soutenir l’activité économique avec une relance de l’inflation, ce qui dans tous les cas réduit le taux d’intérêt réel puisque, rappelons-le, il est égal au taux nominal moins l’inflation. Mais en atteignant la borne zéro du taux d’intérêt directeur nominal, la politique monétaire conventionnelle atteint sa limite d’action. De ce fait, les banques centrales ne peuvent forcer les taux d’intérêt à être très négatifs sinon les agents privés auraient tout intérêt à conserver leur épargne en billets de banque. Dès lors, la très faible inflation observée, voire la déflation, crédibilise d’autant plus l’hypothèse d’une stagnation séculaire.
D’après Eggertsson et Mehrotra (2014), la stagnation séculaire aurait ainsi été initiée par la crise économique et financière de 2008. Cette dernière est associée à un surendettement des ménages qui s’est traduit durant la crise par un rationnement du crédit à ces mêmes ménages. Dans ce contexte, le rationnement du crédit engendre une baisse de la demande et une abondance d’épargne. Dès lors, le taux d’intérêt réel d’équilibre diminue. Les autorités monétaires, pour contrer la faible inflation associée à la chute de la demande doivent alors réduire leur taux directeur, mais une telle politique n’est bien sûr possible que lorsque le taux nominal associé pour garantir l’obtention de la cible d’inflation reste positif, c’est-à-dire si le taux d’intérêt n’a pas atteint la borne zéro. Si tel est le cas, alors la politique monétaire conventionnelle devient inactive en atteignant la ZLB. Dans une telle configuration, la cible d’inflation ne peut plus être atteinte, ce qui mène l’économie vers une zone de faible inflation, voire même de déflation. Dans ce dernier cas de figure, la rigidité nominale à la baisse des salaires se traduit par un renchérissement du coût réel du travail et donc par une baisse de la demande de travail par les entreprises. Par conséquent, le chômage augmente de manière persistante.
Etat des lieux des économies avancées :
Nombreux pays développés sont actuellement confrontés à des situations de croissance faible, de taux d’intérêt proche de zéro et une inflation qui ne décolle toujours pas.
Figure 1. Taux d’intérêt nominal de 10 ans

Source : OCDE
La figure 1 montre une tendance baissière des taux d’intérêt de long terme dans l’ensemble des économies avancées, corroborant à la fois le déclin des taux d’intérêt de court terme et de l’inflation.
Dans un contexte d’ouverture économique, il est observé que cette baisse de taux d’intérêt est associée à de fortes fluctuations au niveau des balances de paiements de ces pays (Summers et al., 2016), comme le montre la figure 2.
Figure 2. Solde du compte courant

Source : Banque mondiale
Par ailleurs, le déficit du solde du compte courant semble être un indicateur de déficit entre épargne et investissement comme le suggère les mouvements de capitaux observés sur la même période (voir figure 3).
Figure 3. Sorties nettes des capitaux des économies émergentes

Source : Institute for international finance
Description théorique :
L’ensemble de ces évidences témoignent des liens qui puissent exister entre la stagnation séculaire et les mouvements de capitaux.
En effet, Summers et al. (2016) ont démontré, à travers un modèle IS-MP (Romer, 2013), qu’une situation de stagnation séculaire peut être transmise d’une économie à une autre par le biais des mouvements de capitaux entre ces deux économies.
Considérons un cas hypothétique de deux économies X et Y, où  X est dans situation de stagnation séculaire alors que Y ne l’est pas. Des flux de capitaux de l’économie X vers Y, implique que le taux d’intérêt réel naturel devrait baisser afin d’équilibrer le marché des capitaux qui, désormais, accuse une offre supplémentaire de l’épargne. Cette baisse du taux d’intérêt naturel implique des pressions sur la politique monétaire afin d’abaisser le taux directeur, car sinon au cas où le taux directeur est au-dessus du taux naturel la demande se déprime. Ainsi, la politique monétaire abaisse son taux afin de soutenir la demande. En cas d’afflux supplémentaire de capitaux, l’économie B se retrouvera franchir la borne zéro du taux d’intérêt. De manière schématique, ce mécanisme peut être décrit de la façon suivante :


Figure 4. Équilibre en stagnation séculaire


Tout d’abord, l’économie se trouve dans une situation d’équilibre au point A, qui constitue l’intersection des deux courbes de demande et d’offre (AD et AS). En cas d‘entrées de capitaux, une dépréciation du taux d’intérêt naturel s’opère vu le déséquilibre instantané entre épargne et investissement. Afin de garder le même équilibre, celui du point B, les autorités monétaires abaissent le taux directeur. Ensuite, des flux de capitaux supplémentaires peuvent conduire à un déplacement de l’équilibre au point C, qui est un équilibre de stagnation séculaire, où le taux d’intérêt a atteint sa borne inférieure, l’inflation est en-dessous de sa cible et l’output gap est ouvert.

mercredi 26 octobre 2016

Transmission mechanism of monetary policy in developingcountries


In a perfect world where the action of the central bank is seen as a signal on thecurrent state of the economy, its actions would be seen as a guideline for all economicagents not only commercial banks. Indeed, lowering the policy rate would implyoptimism among banks and eventually they will drop their lending rate. Therefore,consumers and businesses will see in this drop an incentive to spend and invest. Incontrast, in the case of a rise in the policy rate, the banks but also the economic agentswill understand that there is an overheating in the economy and if they do not inhibittheir activity, problems will ensue. Thus, the reaction of economic agents to the
central bank’s action would simply be a natural reaction with respect to their
understanding of the decisions of the monetary authorities.The breakdown between action of the central bank and decisions of economic agentscan be attributed to three main reasons.First, the credibility of the central bank is considered as a key factor in thetra
nsmission mechanism. It is not considered ’credible’ only the commitment to
maintain the inflation rate at an optimum level, but the credibility also means thecommitment of the central bank to follow a clear policy rule. It follows that the actionof the central bank would be anticipated in advance and it will not create a majorfluctuations in economic cycles due to the action of stabilization by the monetarypolicy. Similarly, this anticipation should strengthen the anchoring of inflation at apredefined target level by the central bank. Thus monetary policy will become a
strong signal reflecting the economy’s condition and guide economic agents’
expectations in line with the objectives of the central bank.Second, in return for the credibility of the central bank, economic agents withoutexception will have to demonstrate a minimum of financial competence: theunderstanding the mission of the central bank, its role and its decisions. In a contextwhere the central bank is understood in its missions and prerogatives, citizens ingeneral would be able to correctly interpret the signals from the central bank and

hence this will allow better transmission of decisions of the central bank. Forexample, in the case of a small business when he realized that the policy rate hasdropped, he will understand that the activity should be boosted and must anticipatebusiness growth which will push him for more investment. Ultimately, byaggregating all the decisions from small entrepreneurs, consumers, etc., this willresult in an increase in aggregate demand and end up with what Woodford calledself-fulfilling expectations.Third, with regard to lending rates, it is clear that in a very small banking marketwhere there is no banking competition, even if there is decline in the cost of moneyfor commercial banks there would be no impact on lending rates. This will preventthe transmission of decisions of the central bank.To conclude, it should be recalled that the transmission mechanism of monetarypolicy is not only an imposed constraint by the central bank to commercial banks.Deeply, it is a mechanism for coordination between all parts of the economy: centralbank, commercial banks and economic agents. This coordination must be based on ashared trust and mutual understanding, throughout the monetary policytransmission chain.